Entre 2500 et 2800 enfants ont dû être refusés cette saison faute de place, et ils sont 2000 environ à ne pas jouer dans de bonnes conditions. Malgré sa bonne volonté, la Ville de Lyon dit faire face à un manque de foncier. En attendant, les clubs font avec les moyens du bord.
Depuis la conversion de Gerland en stade de rugby, il ne reste plus qu’un seul stade dédié au football dans la deuxième ville de France : le stade Balmont. Ce constat, dressé par tous les amateurs de football, symbolise la situation un peu ubuesque que connait la capitale des Gaules. Face à un nombre de licenciés qui ne cesse de croître, les clubs lyonnais sont condamnés à faire des calculs d’apothicaires pour optimiser le temps passé sur les terrains qui leur sont dédiés. "J’ai 650 licenciés pour 550 000 heures par an. On doit refuser 450 enfants chaque saison, dont une grande majorité vient du quartier. On est sous-équipé, d’autant plus avec tout ce qu’on propose comme accompagnement pour les jeunes", constate Jean-Christophe Vincent, le président de Lyon-la Duchère, qui avoue "être dépassé par la situation". "On ne peut pas continuer avec autant d’enfants et si peu de terrains ! On a en a un à la Sauvegarde, mais ce n’est pas suffisant. Les filles, elles s’entrainent sur des quarts de terrain. Et dès 16 ans, on envoie nos joueurs à la Plaine des jeux de Gerland. En TCL, on met une heure. On joue en U17 Nationaux, avec trois entrainements par semaine, pour des gamins qui doivent suivre une scolarité en parallèle. Ce n’est pas vivable", regrette le dirigeant.
Si l’exemple de la Duchère est le plus flagrant, grand nombre de clubs à Lyon sont confrontés à la même problématique. "Ils sont très nombreux à venir me voir", explique Arsène Meyer. Et le président du District du Rhône d’énumérer : "Le FC Gerland, Ménival, Bellecour, mais aussi Montchat, qui malgré les investissements, a besoin encore d’au moins un terrain supplémentaire." Le problème ne date pas d’hier. A tel point que le District du Rhône est le premier et le seul en France à avoir mis en place le système Facility : "C’est un système où on a une grande plage d’ouverture pour organiser les rencontres. C’est-à-dire que les clubs ne sont pas enfermés sur des créneaux horaires, comme le dimanche 15h pour les Séniors. Ils peuvent jouer le dimanche matin ou le samedi soir sans demander l’accord de l’adversaire. Par exemple, le club de Montchat joue en District et en Ligue. Ils n’ont qu’un terrain et demi et plus de 1000 licenciés. Si demain, je supprime Facility, le club tombe."
Malgré plusieurs rendez-vous avec la Ville de Lyon pour alerter sur cette pénurie de terrains, Arsène Meyer dit se sentir démuni : "On me répond qu’il n’y a pas de foncier et que cette situation est la conséquence des choix des prédécesseurs. Et quand je demande s’il y a des projets, la Ville reste floue."
Jean-Christophe Vincent s’est lui aussi emparé du dossier auprès de la Ville. Si le président de Lyon-la Duchère a obtenu le passage de Balmont en synthétique pour aller d’une utilisation des infrastructures de 80 heures par an à 80 heures par semaine, il milite pour la création d’un nouveau terrain : "Il y a un parking au pied de Balmont qui ne sert qu’une fois par semaine pour le marché et qui reste vide toute la semaine. C’est un projet que je porte, que ce parking soit transformé en terrain dédié au développement du football féminin. En plus, il y a un accès direct aux vestiaires de la piscine de la Duchère qui ne servent que l’été. Les moyens pourraient être mutualisés. Surtout, on aimerait que des études soient lancées dès maintenant pour que les choix budgétaires puissent être faits dès le prochain mandat."
"Tous les projets qui sont travaillés avec les clubs pourraient trouver une issue favorable mais pas sur ce mandat car nous avons déjà voté notre Plan Pluriannuel d’Investissement. En revanche, on est en train de travailler pour envisager l’avenir. On veut profiter de leur expertise du territoire et de leurs idées pour qu’on puisse se projeter avec eux sur le mandat d’après", répond Julie Nublat-Faure. L’adjointe aux Sports à la Ville de Lyon l’assure : "Le foot n’est pas laissé de côté, bien au contraire. On est à l’écoute. Je vais à la rencontre des dirigeants pour voir l’état des vestiaires, répertorier tout ce qui pose problème, établir les enjeux comme la mixité qui est un point qu’on prend en compte lors des rénovations pour que tous les licenciés, filles comme garçons, puissent être accueillis dignement."
Outre la rénovation de plusieurs vestiaires, la Ville a planché sur la fusion des deux clubs de la Croix-Rousse pour "mieux travailler sur les équipements et optimiser les créneaux des terrains". "On a également fait de gros investissements pour changer les gazons synthétiques en mauvais état en gazons plus éco-responsables, dont le remplissage se fait à base de liège naturel pour éviter les microparticules de plastique", détaille Julie Nublat-Faure. Le stade Marc-Vivien Foé (Lyon 3e) a ainsi été refait en 2021, avec la rénovation du gazon synthétique et l’extension du second terrain de foot. Le stade Dumont dans le 8e arrondissement sera rénové à l’été 2024 tandis que le stade de la Sauvegarde dans le 9e a fait l’objet de travaux l’été dernier. "On accompagne aussi l’Eveil de Lyon qui est le plus gros club de la ville et qui connait une vraie problématique. On a commencé à améliorer les vestiaires du stade Guillemet pour que les joueurs s’y sentent bien", complète l’élue.
"Lors des derniers mandats, il y a eu un manque d’investissement en rénovation et en accompagnement des bâtiments, des stades et des vestiaires. Ça ne peut pas se rattraper sur un mandat", résume l’adjointe aux Sports, avant de conclure : "On met des budgets très importants pour rénover ou pour transformer et étendre la pratique du football à Lyon, mais la dette est lourde et l’héritage est compliqué."
F.L.